Bien que le Canada accuse un certain retard dans la mise en œuvre des systèmes d’aide à la décision clinique (ADC) dans le déroulement des opérations hospitalières à l’échelle nationale, la CAR collabore actuellement avec des partenaires stratégiques, tel que Choisir avec soin pour élaborer des lignes directrices visant à soutenir leur mise en œuvre dans les établissements de tout le Canada. Même avant notre programme d’aiguillage, les membres de la CAR ont fait le travail supplémentaire pour améliorer l’aiguillage. Le Dr Steve Herman illustre bien cet engagement envers un changement positif. Selon le Dr Herman, l’objectif global de la mise en œuvre des ACD est d’aider les médecins et les patients à prendre des décisions plus éclairées concernant les examens d’imagerie médicale et les traitements.
Aujourd’hui, le Dr Herman travaille pour le département conjoint d’imagerie médicale de l’UHN, du Mount Sinaï Hospital et pour le Women’s College Hospital, et il sait que les avantages des systèmes d’ADC sont bien établis. « Ces systèmes pourraient bien révolutionner les soins aux patients en faisant en sorte que les bons examens soient réalisés dès le départ. Ceci permettrait de raccourcir les files d’attente pour les procédures, réduisant par conséquent les temps d’attente et l’exposition des patients au rayonnement ionisant. Ces systèmes ont également le potentiel d’économiser la main-d’œuvre et les ressources des systèmes de soins de santé en évitant de mener à bien des examens qui ne présentent aucun avantage pour les patients. »
Le Dr Herman s’est intéressé aux systèmes d’ADC alors qu’il rédigeait des rapports sur des TDM thoraciques et qu’il commençait à s’interroger sur la valeur d’un grand nombre de clichés qu’il lisait. Il a proposé à un collègue de réaliser une étude sur l’incidence de ces examens sur la survie des patients. « Nous avons choisi d’étudier un groupe de patients atteints d’un cancer du poumon ayant subi une intervention chirurgicale et avons publié notre travail dans le Journal of Thoracic Oncology. Nous avons mis l’accent sur le fait que les TDM de routine que nous conduisions après lobectomie sur ces patients n’avaient aucune incidence sur leur survie. Le problème s’est avéré bel et bien réel, nous nous sommes donc demandé ce qui pouvait être fait pour le résoudre. Nous avons pensé que si les médecins avaient accès à des lignes directrices au moment de prescrire des examens, cela pourrait les amener à choisir des examens plus pertinents, ce qui signifierait parfois de ne pas prescrire d’examens du tout. » D’autres études menées au Canada et ailleurs montrent les mêmes conclusions que celles du Dr Herman concernant l’efficacité des examens prescrits. Une étude du ministère de la Santé de l’Ontario a révélé que, dans 85 % des cas, les médecins modifiaient leurs exigences en matière d’examen lorsqu’on leur en donnait la possibilité avant de les prescrire. Le Dr Herman a fait plusieurs études sur cette question. Depuis, il a d’ailleurs fondé MedCurrent, une compagnie d’ADC axée sur l’amélioration de la qualité des soins et la gestion des coûts du système de soins de santé.
L’ADC commence à s’implanter un peu partout au Canada. Selon le Dr Huy Le, chef de la radiologie au Jewish General Hospital (JGH) de Montréal, l’JGH est en première ligne au Canada pour mettre en œuvre l’ADC en raison de son expérience avec l’intégration de la technologie. « Le PDG de notre établissement, le Dr Lawrence Rosenberg, avait prévu depuis de nombreuses années le recours à des systèmes de santé numérique, notamment à des applications pertinentes en imagerie médicale. » Le Dr Le explique que c’est cette approche qui a mené l’JGH à créer un Order Entry System (OES) plus tôt cette année, système qui est aujourd’hui en phases de production et de test auprès des cliniciens et cliniciennes. Les interfaces de MedCurrent avec l’OES ont été réalisées parallèlement aux essais et sont actuellement fonctionnelles. Le service de radiologie du JGH a l’intention de déployer MedCurrent au cours des prochains mois.
Le Dr Herman explique que les États-Unis sont actuellement les leaders mondiaux de la mise en œuvre de systèmes d’ADC étant donné que ces derniers ont été intégrés dans la législation fédérale américaine sur les soins de santé. « 2014 marque l’adoption de la loi Protecting Access to Medicare Act (PAMA), qui englobait une clause relative à l’ADC. Plus précisément, cette loi prévoit que Medicare ne paiera pour les TDM, les IRM, les examens de médecine nucléaire (y compris les TEP) que s’ils ont été prescrits par le biais d’un système d’ADC, et ce dès début janvier. » De même, le National Health Service (NHS) du Royaume-Uni a reçu 11 millions de livres sterling (l’équivalent de 18 millions de dollars canadiens) pour mettre en œuvre des systèmes d’ADC. Lors de ses réunions de défense des intérêts avec les députés et les fonctionnaires de la santé, pendant la Semaine sur la Colline de février, l’un des principaux points évoqués par la CAR était la nécessité d’un investissement fédéral dans les systèmes d’ADC à l’échelle nationale.
Après plusieurs années de pandémie, il est devenu évident que le système de soins de santé du Canada peut être mis à rude épreuve. Le recours à des systèmes d’ADC fondés sur des données pour déterminer les bons examens à prescrire, avec un haut degré d’efficacité est un bon moyen d’alléger cette pression dans le présent et permettra aux patients de bénéficier de soins de santé optimaux et durables à long terme.